La fin de la guerre de volume, le retour de la dynamique et l’empire du Maximizer

        En temps que Bedroom Producer, tu t’es probablement déjà retrouvé dans ce cas frustrant où tu écoutes ton nouveau morceau sur Soundcloud et il sonne BEAUCOUP moins fort que celui de ton artiste préféré. Tu essaies de mixer une de tes compositions avec une prod professionnelle et tu dois ajuster le Gain à outrance pour que les niveaux concordent.

Quelques recherches sur le grand Google plus tard, tu apprends qu’avant de sortir un morceau, tu DOIS le compresser, le limiter, le maximizer au maximum (normal c’est un maximizer) si tu veux avoir la moindre chance d’être entendu. Tu cherches des tutoriels sur la compression et le mastering qui semblent être ton chainon manquant vers le succès. Tu apprends toutes les bases et tu appliques tout ce que tu as appris sur ton prochain morceau. Etrangement tu as l’impression qu’il sonne beaucoup mieux que tout ce que tu as produit avant. L’apparence du Waveform sur Souncloud ressemble de plus en plus à une brique, la dynamique n’est plus qu’un lointain souvenir. Tu es officiellement devenu, malgré toi, un soldat de la guerre du volume.

Exemple type de waveform surcompressé

Exemple type de waveform surcompressé

 

Un peu d’histoire

        Dans les années 50, on a commencé à remarquer que les chansons qui sonnaient plus “fort” étaient jouées plus souvent dans les Jukebox. C’est, d’après les rumeurs, là que la guerre du volume aurait débuté. L’industrie du vinyl aurait commencé à produire dans le but de sonner de plus en plus fort. Heureusement, sur les vinyls, il existe une limite physique de profondeur des sillons qui impose un niveau de volume maximum. Le conséquence en était que même le vinyl le plus puissant gardait une dynamique “raisonnable”. Malheureusement, cette limite a disparu lors de l’introduction de l’enregistrement digital et de l’apparition du CD au début des années 80.

A l’époque de l’analogue, la plupart des équipements utilisaient un “niveau de référence nominal”, en d’autres mots, un moyenne du niveau du signal. Un espace libre était laissé au dessus de ce niveau pour laisser de la place au “Peaks” sans saturer. Cet espace libre s’appelle le “headroom”.
Avec l’introduction des CDs, les niveau moyens ont été élevés au maximum pour compenser les faiblesses des convertisseurs D/A (Digital vers analogique) à traiter les signaux de plus faible intensité. Dérobant ainsi l’espace autrefois dédié au “headroom”.
La course pouvait alors redémarrer. L’utilisation de limiteurs, compresseurs, maximizers est devenue l’arme de tous les producteurs pour approcher le plus possible le niveau moyen du niveau des peaks. Réduisant ainsi de plus en plus la dynamique des morceaux et tuant définitivement la notion de “headroom”.

 

Le Messie : Le Loudness

        Depuis les années 80, nous avons assisté à une augmentation lente mais constante du volume dans la musique Pop.
Difficile d’imaginer que le support ayant la capacité de restituer la plus grande plage dynamique de toute l’histoire (oui oui je parle toujours du CD) est devenu le plus utilisé pour diffuser de la musique de plus en plus compressée. Les ingénieurs du son du monde de la musique étaient de plus en plus agacés par ce phénomène, et Ils n’étaient pas les seuls.

        Le monde de la télévision a commencé à subir cette guerre du volume dans la publicité. A la base, la seule limitation demandée par les chaines de télévision par rapport au niveau audio était de ne pas dépasser le MPL (Maximum Peak Level)
En effet, la tendance des publicitaires à créer des publicités ayant un niveau sonore de plus en plus élevé pour attirer un maximum l’attention du consommateur est devenue au fil du temps insoutenable. Agaçant de plus en plus les téléspectateurs, forcés de baisser le volume pour chaque coupure pub, et même parfois de publicité en publicité.

La solution mise en place pour éradiquer ce problème s’appelle communément le “Loudness” ou “LU” dans le monde de la télévision francophone.

A la base de l’idée, le principe qu’il ne faut plus quantifier le niveau de la musique par rapport à son intensité absolue, mais plutôt par rapport au volume perçu par l’auditeur. Le loudness mesure l’intensité du son perçue par l’oreille humaine et non pas simplement les peaks. Dés lors, si tous les morceaux sont joués à un même volume “perçu”, il n’y à plus aucune raison, ni moyen de se battre dans cette guerre du volume.

 

Le Principe

Le Loudness se base sur trois mesures distinctes. Les Peaks, l’intensité instantanée (le Short term) et l’intensité sur une durée plus longue (le Long term). Le niveau de référence est redescendu de manière significative pour pouvoir laisser passer les Peaks sans risquer la saturation. Les normes varient légèrement à travers le monde, mais le principe général reste constant.

 

Les répercutions dans le monde de la musique

        Après le monde de la télévision, la radio, elle aussi victime de la surcompression, est la prochaine cible du loudness. A l’heure de cet article, la radio n’est pas encore passé aux normes loudness, mais le monde de la musique commence sa métamorphose. En effet, les plus grands distributeurs de musique online ont déjà passé le cap. Itunes, Spotify et Youtube ont adopté leur propre norme.

 

iTunes Radio – 16 LUFS
iTunes Soundcheck – 16 LUFS
YouTube – 13 LUFS
Spotify – 12 LUFS

 

 

Toute musique streamée à partir de ces plateformes est normalisée sous une certaine forme de Loudness, lissant les niveaux sonores de morceau en morceau. Le niveau des morceaux les plus compressés est fortement diminué pour atteindre le nouveau niveau de référence de la plateforme. Ils se retrouvent donc dénués de dynamique et de puissance.

 


 

Un morceau hyper compressé est ajusté au nouveau niveau de référence. Il se retrouve dénué de dynamique et de puissance.

Un morceau hyper compressé est ajusté au nouveau niveau de référence. Il se retrouve dénué de dynamique et de puissance.

Dans cet exemple, le morceau original de John Lennon – Working Class hero.

  • La première piste, est la version originale.
  • Nous l’avons, dans la seconde piste, compressée et maximisée pour la rendre la plus puissante possible.
  • Dans la troisième piste nous avons diminué le niveau de la piste Compressée et maximisée pour qu’elle réponde aux nouvelles normes “Loudness” de iTunes Radio. (-16db)
  • Dans le dernier exemple, nous avons ajusté le niveau de la version originale pour atteindre le niveau de référence iTunes Radio. NDLR, nous avons même dû pousser un peu le gain pour arriver au niveau de référence.

On remarque assez clairement dans cet exemple qu’il n’y a plus aucun intérêt à surcompresser la musique. Le morceau original garde une grande dynamique, de la subtilité, et une construction en crescendo alors que le morceau compressé ne sonnera pas plus fort, perd cet effet crescendo et devient ennuyeux à l’écoute.

 


 

Soundcloud

Malgré la prise de conscience des grandes plateformes, tout le monde ne semble pas prêt pour le futur. C’est le cas de Soundcloud qui, aux dernières nouvelles, n’a aucune intention de

Soundcloud take down Knife Party's song for copyright infringement to themselves

Soundcloud take down Knife Party’s song for copyright infringement to themselves

s’adapter au loudness.

Nous aurions aimé vous dire qu’il est temps de redonner de la dynamique à vos morceaux et d’arrêter de surcompresser vos productions mais malheureusement, si votre but est d’uploader sur Soundcloud, le guerre du volume n’est toujours pas finie. On peut par contre affirmer qu’il n’y a plus aucune raison d’uploader sur Soundcloud. Qui écoute encore son “Stream” sur Soundcloud? La plateforme est inondée d’auto promotion et scannée en permanence pour trouver la moindre trace de fraude de copyright. L’ère de Soundcloud comme ami du Bedroom producer et vitrine de l’Indé est finie, et on espère qu’elle emportera avec elle le reste de cette guerre du volume.

 

Un Plugin pour Mesurer le Loudness?

  • Le grand internet entier nous redirige vers le bande de plugins gratuit de chez Hofa quand on introduit une recherche de plugin gratuit pour mesurer le Loudness. Vous aurez peut-être plus de chance que nous, mais les liens qui devaient arriver par mail pour le téléchargement ne sont jamais arrivés. Nous avons abandonné après la deuxième tentative infructueuse. Quoiqu’il en soit, les critiques sont bonnes pour ces plugins donc voici le lien où les trouver : Hofa Free Plugin Bundle
  • Le plugin que nous utilisons est celui de Melda Production. Il est, lui aussi, gratuit et fonctionne très bien. L’interface est loin d’être aussi attirante que dans nos plugins payants favoris, mais il fait son boulot, et il le fait bien. De plus il fait partie d’un Bundle rempli de pépites donc un générateur de bruit, un oscillateur (dont vous pouvez ajouter manuellement le pitch en Hertz, ce qui est vraiment indispensable pour tester des hauts parleurs) et plein d’autres petit plugins utiles. Voici donc le lien pour le télécharger : Melda production free effects bundel

 

 

 


 

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